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Il est certain, me dit le chef détective Jack Wallis, que l’habitude du métier, des enquêtes, des déductions qu’elles imposent, nous permettent d’acquérir une sorte de sixième sens que j’appellerai l’intuition. Mais il est non moins certain que notre perspicacité serait et demeurerait mise en défaut si nous étions secourus parfois par ce précieux auxiliaire de la justice : le hasard.

Ce fut ce dernier qui me permit de mettre un point final à l’affaire de la bijouterie Hankel.

Je vais vous la résumer afin que vous en possédiez bien tous les éléments...

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" La scène s’est déroulée un samedi matin à Détroit. Elle a eu pour théâtre la grande bijouterie Hankel. Ce matin-là, le patron est au deuxième étage de l’immeuble, occupé à vérifier des comptes. Un des employés est parti à la banque pour y déposer des fonds. Le magasin est gardé par un second employé, Fred Muller, et une vendeuse, Miss Margaret Hobson.

Une importante personnalité locale est décédée et son convoi passe devant la bijouterie. Fred Muller sort pour regarder passer le convoi. Miss Hubson est donc momentanément seule, lorsqu’un individu se présente devant elle, lui assène un coup de matraque sur le crâne, rafle les plus précieux bijoux et disparaît.

On me confie le soin de conduire l’enquête. Sur quels indices vais-je me baser pour m’orienter ?

Miss Hubson avait le dos tourné lorsque l’inconnu a fait irruption dans le magasin et, par conséquent, ne me fournit de lui qu’un signalement assez vague, sauf celui-ci, le malfaiteur portait de fortes moustaches. La matraque restée au sol ne m’apporte aucune indication : pas d’empreintes digitales. Prudent, le voleur s’était ganté.

En résumé, rien qui soit de nature à aiguiller mes recherches. Dans notre pays, les fortes moustaches sont assez rares et, par la suite, je déduisis que celles de l’escarpe étaient vraisemblablement factices.

On opéra de minutieuses recherches chez les personnages douteux qui tirent du recel leurs principaux moyens d’existence. On vérifia méticuleusement l’emploi du temps de repris de justice capables d’avoir accompli le vol.

Rien…pas une lueur…lorsqu’un soir…

Un soir, vers 11h, je pénétrai dans le bar de l’Antilope volante. C’est, je vous prie de me croire, un endroit peu sûr et je déconseillerai à mon plus cruel ennemi de la visiter lorsque la nuit est venue.

La pègre la plus sinistre, les individus les plus dangereux s’y donnent rendez-vous. Mon entrée fut saluée par des rires ironiques.

- Hello, inspecteur, lança sarcastiquement un Ecossais, Mc Ephrin, une sombre brute à qui j’avais passé les menottes deux ou trois fois, venez-vous fêter avec nous notre beau succès dans l’affaire Hankel ? Ou bien êtes-vous toujours à la recherche du voleur ?

- Je ne sais pas, répondis-je placidement, si je recherche vraiment un homme. Ce qui est certain, c’est que je recherche un visage sur lequel je pourrai placer ceci.

Et d’un petite boîte que je tirai de ma poche, je sortis une paire de moustache postiches :

- Tenez, Mc Ephrin, continuai-je, venez donc ici. Je vais vous les essayer. Elles doivent fort bien aller avec votre genre de beauté.

L’Ecossais me rejoignit  au centre du bar, comme pour se prêter docilement à l’expérience.  Mais au moment où je me préparai à lui poser sous le nez les moustaches postiches, il brandit vers moi un browning et tira.

Heureusement pour moi, j'étais en éveil. D’un coup sec de la main, je  fis dévier l’arme, et d’un furieux coup de pied sur la cheville, j’étendis mon agresseur et me jetai sur lui. Avant qu’il ait eu le temps d’esquiver un geste de résistance, une solide chaîne d’acier liait ses poignets.

- Maintenant, mon gars, lui dis-je,  il ne vous reste plus qu’à me raconter votre petite histoire. Si vous êtes gentil et si vous avouez, je consentirai, moi, à oublier que vous avez tenté de me tuer.

L’Ecossais avoua, c’était bien lui qui avait dévalisé la bijouterie Hankel. "

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Et, comme je lui affirmais qu’une fois de plus son «  flair «  ne l’avait pas trompé, le détective protesta :

- Laissez mon flair tranquille, mon garçon, car mon flair, je le confesse, n’a rien à voir dans cette affaire. Cette affaire me causait un intense surmenage cérébral. J’y songeais sans cesse. Un jour, pour donner un dérivatif à ces obsédantes pensées, j’entrai dans un cinéma où l’on donnait les actualités de la semaine. Le convoi funèbre, dont je vous ai parlé au début de cette histoire était projeté sur l’écran. Il avait été filmé  par un opérateur qui se trouvait  installé au premier étage d’un immeuble  situé en face de la bijouterie. Sans le vouloir, cet opérateur avait saisi le voleur au moment où il sortait du magasin. Au grand ahurissement de mes voisins de spectacle, je poussai un cri de joie et bondis hors de la salle.  La suite, agrandissement de la partie de la pellicule qui m’intéressait, identification du voleur, ne fut qu’un jeu.

Quel dommage, qu’il n’existe pas un dieu Hasard, j’aurais volontiers fait brûler une douzaine de cierges devant son effigie.

Tag(s) : #Almanach Vermot
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