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Le loisir est un terme qui a toujours été et demeure vague, un peu mystérieux, aux frontières difficilement cernables. Le dico nous dit qu'il est le temps de liberté dont on dispose en dehors des occupations imposées et obligatoires. Pour les analystes, c'est ce qui reste après le sommeil, le travail, les transports, les activités domestiques, et l'éducation des enfants.

Au pluriel, les loisirs sont les distractions, les plaisirs, les moments de détente auxquels on se livre pendant les temps libres.
Comment le loisir et les loisirs sont entrés peu à peu dans notre vie quotidienne en la bouleversant profondément et en offrant à tout un chacun des perspectives nouvelles de liberté, de connaissances et de développement personnel ?

Tout au long du 20ème siècle et jusqu'à aujourd'hui, la part du travail dans la vie des hommes a diminué de façon spectaculaire. La mécanisation et l'informatisation de la société post-industrielle, l'avènement des congés payés, la diminution de la journée de travail, l'allongement de la durée de vie et celle de la scolarité, la baisse de l'âge du départ à la retraite en sont les principaux facteurs. Le nombre d'heures consacrées au travail au cours de toute une vie a diminué de moitié depuis le début du siècle passé. A l'heure actuelle la population "active" (y compris les chômeurs) est supérieure d'à peine 3 millions à ce qu'elle était avant 1914 alors que la population totale a augmenté de 22 millions. Il est fort probable que les débats tourneront dans quelques décennies, autour des 32 heures de travail hebdomadaire.

L'avènement des premiers congés payés en 1936, marque un tournant dans cette diminution du temps de travail en garantissant à tous les salariés un droit aux "loisirs" réservé jusqu'alors aux classes privilégiées.

Du point de vue macroéconomique, ces activités sont dites "non productives" et n'entrent pas dans le PIB (mesure de la production totale de biens et de services réalisés à l'intérieur d'un pays, dans un temps donné) bien qu'elles produisent une part non négligeable de richesses. Laissant le libre choix à chacun, elles offrent une panoplie de possibilités, telles que se détendre, se divertir, jouer, se former, s'instruire, faire du bénévolat, exercer une activité culturelle, artistique, manuelle, faire du sport, voyager, se consacrer à la vie familiale, etc...

Le temps libre n’est pas nécessairement structuré par une activité spécifique, il se définit en creux, par la vacuité et, à ce titre, est toujours suspecté de conduire au désœuvrement. La crainte du temps vide n’est pas absente de la mise en cause de l’utilité sociale du temps libéré par la réduction du temps de travail à 35 heures.

La première manifestation collective de ce temps libre est la généralisation des vacances qui va entraîner ce que l'économiste et sociologue Jean Viard appelle une nouvelle culture du départ. "A l'évolution du temps il faut ajouter celle de l'espace, dont la perception traditionnelle est également remise en cause par l'explosion des moyens de transport qui permettent de traverser la France en trois heures et de faire le tour de la planète en une journée. En 1950 nous parcourions en moyenne cinq km par jour, aujourd'hui nous en parcourons 45, soit neuf fois plus".

Dès 1962, le sociologue Joffre Dumazedier dans son ouvrage "Vers une civilisation des loisirs", nous évoque les bouleversements importants que les loisirs vont provoquer dans nos sociétés futures.

L'expression "industrie des loisirs" fait directement écho à la notion de loisirs-divertissements, en proposant une vision productiviste et marchande dédiée à la consommation de masse.

Dans son ouvrage « la crise de la culture », paru en 1961, Hanna Arendt, philosophe, écrit « L’industrie des loisirs est confrontée à des appétits gargantuesques, et puisque la consommation fait disparaître ses marchandises, elle doit sans cesse fournir de nouveaux produits. Ceux qui produisent pour les mass-médias pillent le domaine entier de la culture passée et présente, et modifient ce matériau pour en faire un objet facile à consommer (…) La culture de masse apparaîtra quand la société de masse consommera littéralement les objets culturels, les engloutira et les détruira.

Un objet est culturel en fonction de la durée de sa permanence ; son caractère durable est l’exact contraire du caractère éphémère (dans l’industrie des loisirs) qui le fait vite disparaître par son utilisation et par usure".

En 2014 ''industrie mondiale des médias et des loisirs est en constante augmentation et devrait croître de 5% par an en moyenne d'ici 2018. La multiplication des offres de loisir est un indicateur de "bien-être" d'une société.

"Pour que le temps libre devienne loisirs il faut qu'il ouvre la voie à des comportements choisis et autogérés susceptibles de lui donner un sens. Le temps libre n'a pas grande signification lorsqu'il est vécu ou subi dans l'indigence, la pauvreté, la carence éducative et le retrait social forcé" nous dit Michel Bellefleur, professeur de philosophie.

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Etymologie et mythologie...

Le mot loisir, dérivé du verbe latin licere (« être permis »), renvoie, au début du 12è siècle, aux notions positives de « liberté », et d'« oisiveté ». Puis, à partir du 18e siècle, il évolue vers le sens de « distraction ». Le même verbe est à l’origine des qualificatifs « licite et illicite », termes disposant d’une connotation morale ou juridique (employés au participe passé, ils donnent " licitus").

A noter que cette permissivité (du loisir) n’était pas accessible à tous , elle était un privilège associé à la détention d’un statut social héréditaire : la citoyenneté romaine. Ce statut sera maintenu et prolongé dans le cours de l'histoire pour les castes et classes nobles jusqu’à l’avènement des démocraties à citoyenneté générale.

 

Quelques Expressions :

Avoir le loisir de : permettre, avoir la possibilité de...

Tout à loisir : autant qu'on le désire. Ex : "aimer à loisir, etc"

Etre loisible : être permis. Ex "Il est loisible à chacun de voyager..."

Le terme loisir (temps libre) a connu un glissement sémantique dans les années 60-70, vers celui de loisirs (divertissements et sport).

Dans l'Antiquité le loisir se définissait par deux mots :

-en grec « Skholè » (qui a donné le latin « schola » et le français «école» )

-en latin, « otium » (le mot qui désigne le temps de loisir, il a donné le français oisif), qui est l'opposé du « negotium », ( nec-otium : le non-loisir ) qui a donné naissance en français au terme de négoce (entendu comme l'activité d'affaires, ou l'activité de commerce ).

Sénèque (philosophe romain de l'école stoïcienne) loue les mérites de l'otium et le considère comme la caractéristique de l’homme vraiment libre – mais en ajoutant qu’il est bon de le consacrer à un rôle social ou politique dans la cité. Cette vision est une dimension fondamentale qui trouve son prolongement dans la conception aristocratique : l'homme « noble », l'aristocrate, s'intéresse davantage à l'activité libre qu'à l'activité contrainte. Le travail est alors considéré comme une servitude de l'être de condition inférieure.

Si l'on remonte aux temps les plus anciens de la mythologie grecque, l'idée du loisir apparaît dans le mythe de Prométhée où l'on trouve l'autre mythe des cinq âges dans lequel apparaît "l'âge d'or" qui évoque un monde idyllique où travail et loisir se confondent. Prométhée est l'un des Titans qui créa les hommes et qui déroba le "savoir divin de l'Olympe" (des dieux) pour le donner aux hommes. Il fut pour cela condamné par Zeus à mourir chaque jour pour renaître chaque nuit.

Le mythe de Prométhée est admis comme métaphore de l'apport de la connaissance aux hommes. C'est un des mythes récurrents dans le monde proto-indo-européen (mais on le retrouve également chez d'autres peuples).

Ce mythe (correspondant à la naissance des dieux, ou théogonie) fut rapporté pour la première fois par HESIODE, poète grec, dans " Les travaux et les jours", 8ème siècle avant J.C, et repris ensuite dans l'antiquité romaine par de nombreux autres poètes comme Ovide au début de son récit "Les métamorphoses". Le mythe distingue 5 âges (ou cinq races) d'humains successifs dans lesquels l'existence, d'abord idéale, se dégrade progressivement. Chacune de ces races est créée par les dieux de l'Olympe, et vient à s'éteindre après un temps déterminé. On distingue l'âge d'or, l'âge d'argent, l'âge de bronze, l'âge des héros et l'âge de fer à la fin duquel le cycle des âges serait alors bouclé pour retourner en sens inverse.

L'âge d'or apparaît dès la création de l'homme quand Saturne (ou Cronos pour les Grecs) règne dans le ciel. C'est un temps où les degrés de liberté et de loisir sont majoritaires. Un temps d'innocence, de justice, d'abondance et de bonheur. En l’absence de tout justicier, spontanément, sans loi, la bonne foi et l’honnêteté y étaient pratiquées. L'absence de saisons symbolise l'absence de fuite du temps, considéré par les philosophes grecs et romains comme étant l'origine de la décadence : tempus edax rerum (le temps qui dévore les choses). Pour les romains, ce mythe symbolisait la nostalgie du passé prospère et mythique des premiers temps de Rome, lorsque les citoyens étaient naturellement bons et vertueux. L'âge d'or a donné de nombreuses peintures allégoriques à compter de la Renaissance.

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La place des loisirs dans notre société post-industrielle

 

Un peu d'histoire...

On retrouve dans les textes fondateurs judéo-chrétiens cet âge idyllique mythique de l'âge d'or, état originel de l'humanité : c'est l'Eden (qui est aussi la promesse d'un au-delà paradisiaque). Une correspondance a été explicitement établie entre le mythe de l'âge d'or et de l'Eden d'où l'homme fut chassé après avoir consommé la pomme de la connaissance.

Cette période semble correspondre à la période post-néolithique où le chasseur-cueilleur (Abel) est supplanté par l'agriculteur sédentaire (Caïn), nouvel ordre impliquant la nécessité du travail. « Désormais tu travailleras à la sueur de ton front ». L'ère du loisir et la société de l'abondance et de la gratuité est rattrapée par le "principe de réalité".

Les préceptes évangéliques sont en effet un appel à ne pas perdre sa vie dans les futilités terrestres mais à la gagner en sachant discerner l'essentiel.

1- Les prémices des loisirs et des vacances

Dès la fin du 18è siècle la révolution industrielle et commerciale fait basculer une société à dominante agraire et artisanale et affecte profondément le monde du travail dans lequel les loisirs, pour l'ensemble des travailleurs ne tiennent pas de place.

Le concept des vacances est lié à l'apparition des civilisations urbaines, contrairement au monde agricole qui, à cause du climat, ne dicte pas un rythme de travail continu tout au long de l'année. Au Moyen Age, il existait déjà en Europe de l'ouest des « vacances » qui correspondaient à la période des moissons en été où les universités fermaient pour permettre à tous d'aller travailler aux champs.

Au 19è siècle, les vacances se répandent dans toute l'aristocratie et la bourgeoisie d'Europe occidentale. Elles correspondent à la période où les classes supérieures de la société quittaient leurs demeures principales (qu' elles les laissaient vacantes, d'où le mot vacances) pour rejoindre des résidences secondaires afin de profiter de la nature et des bienfaits du climat marin ou montagnard pour la santé. C'est aussi pour la classe privilégiée le début d'un tourisme exotique en Europe, notamment en Italie (Venise, Florence), lieux que venaient découvrir également les artistes et les écrivains.

Les riches britanniques (enrichis par le colonialisme) ont été les premiers à se tourner vers les stations balnéaires de leurs côtes, puis de l'autre côté de la Manche, à Biarritz et sur la Côte d'Azur (la célèbre "promenade des Anglais" à Nice fut construite en 1820 pour ceux qui y possédaient de nombreuses résidences d'hiver).

 

2- Quelques dates dans l'avènement des loisirs

Les prémices des premiers loisirs apparaissent dès le milieu du 19è siècle et sont l'apanage d'une minorité bourgeoise

1833 : fondation du Jockey club en France

1839 : naissance en Allemagne des guides de voyage Baedeker sur le Rhin

1860 : création de la station balnéaire de Deauville

1869 : Vienne, en Autriche, invente la carte postale et en 1870 première carte postale française envoyée de Strasbourg lors du siège de la ville. En 1899 lors de l'inauguration de la Tour Eiffel apparition de la première carte postale illustrée.

1875 : création du premier office de tourisme français.

1876 : premières colonies de vacances en Suisse, puis suivies

En France, après la première guerre mondiale les colonies de vacances font partie du système scolaire français officiel. Elles connaissent leur âge d'or entre 1930 et 1960. En 1955, plus d'un million d'enfants français partent en colonie. 1889 : le Moulin Rouge ouvre ses portes au pied de la Butte Montmartre

1890: création du Touring Club de France au moment où le vélo connaît un succès prodigieux

1895 : 1ère véritable Course Automobile au monde (Paris-Bordeaux-Paris). Création du 1er Automobile Club au Monde (l'A.C.F).

1900 : commercialisation du jeu "Mecano"

1904 : inauguration de la Foire de Paris

1905 : 1er Guide Touristique : répertoire d'hôtels et de réparateurs d'automobiles et première élaboration d'un Code de la Route

1907 : premiers camps scout en Angleterre. En France ils sont créés en 1920 par le père Sévin. On compte aujourd'hui 25 millions de membres dans le monde.

1920 création du Club Alpin français et de l'Union Nationale des associations de tourisme (UNAT)

1924 : premiers permis de conduire délivrés par les préfets

1933 naissance du Monopoly par l'américain B. Darrow.

La Conférence internationale du travail de Genève, en 1924, stipule dans ses conclusions : « qu'elle a pour objet de garantir aux travailleurs, outre les heures de sommeil nécessaires, un temps suffisant pour faire ce qui leur plaît, ainsi que l'indique exactement l'étymologie du mot loisirs".

Avec les lois du Front Populaire sur les « congés payés », une forme nouvelle de l’aménagement du temps s’officialise en 1936, garantissant à tous les salariés un droit aux loisirs et instaurant de fait une cassure dans l’année de travail. Les premiers congés sont accompagnés de la création du billet de chemin de fer en 1937. Mais les travailleurs sont alors peu nombreux à partir en vacances. Le véritable mouvement démarre avec les trois millions de vacanciers en 1948, et plus de cinq millions en 1951.

 

3- L'avènement de l'automobile

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Va bouleverser les loisirs et raccourcir le temps...

En 1921, la France comptait une automobile pour 129 habitants, vingt ans plus tard en 1945 la France connaîtra une période de prospérité au cours des "trente glorieuses".

Considérée jusqu' alors comme objet de luxe, l'automobile va conquérir les foyers les plus modestes. Dès la fin des années 50, Renault donne le départ d’une production en chaîne en lançant sur le marché à des prix plancher la mythique « quatre-chevaux », en 1954 Citroën met au point la nouvelle et populaire Deudeuche ou 2CV (créée en 1939, elle connaît un succès foudroyant). Parallèlement en Allemagne se développe la Volkswagen dite "coccinelle"(créée en 1938,) petite voiture par excellence, pas chère, solide, qu’apprécieront des millions de gens à travers le monde, ainsi que la Fiat 500 dite "Topolino" (petite souris) lancée en Italie en 1939.

L'automobile devient alors accessible en créant de nouvelles habitudes de vie. Elle sillonne la France des nationales, tandis que disparaissent les grandes marques des véhicules de prestige.

Au début des années 60 se créent les premières banlieues résidentielles ainsi que les premières autoroutes. Les voitures citadines apparaissent telles que la R5 ou la Peugeot 104. La voiture devient objet d'utilité pour se rendre au travail. Avec l'avènement des loisirs, elle offre de nouvelles perspectives de mobilité, élargissant le champ des voyages. A cette époque les automobilistes ne connaissent pas les embouteillages, la pollution et les limitations de vitesse. Conduire une voiture est un plaisir que l'on s'offre et qui entre dans l'histoire de la vitesse. Le manque d'uniformité d'infrastructures de l'époque ne permettait pas de calculer le temps des parcours et un événement fortuit pouvait retarder de plusieurs heures ou de plusieurs jours la réalisation d'un voyage sans que cela entraîne les contrariétés insurmontables actuelles. Ainsi la chanson de Charles Trenet écrite en 1959, ("Nationale sept") illustre ce temps heureux des vacances où l'on prenait le temps de flâner sur la route tout en appréciant les lieux parcourus. Selon l'expression d'Alain Corbin, "le temps restait poreux"...

 

4 -Avènement des loisirs sportifs dans l'éducation

Après la Seconde guerre mondiale, la société industrielle avide de valoriser et de rationaliser l’usage du temps pour améliorer et accélérer la production nationale a voulu aussi mesurer, planifier la durée de chaque activité de loisir qu'elle pouvait contrôler.

Au cours des années 50, les responsables de l’éducation et du loisir des jeunes,(enseignants, animateurs et entraîneurs sportifs) , partagent cette idéologie de la programmation et de la comptabilisation du temps. De même que le rythme de la production, celui du loisir se révèle être une denrée précieuse. A l'école on privilégie le modèle moral de l’entraînement sportif, on le valorise, on prévoit, on programme les apprentissages, on contrôle leur progression.

Parallèlement se sont développés les mouvements d'éducation populaire et de loisirs où le temps est plus souple, non exploité et dans lesquels de nombreux bénévoles y consacrent une part de leur temps libre. Je citerai quelques exemples tels : les patronages (laïcs et paroissiaux), les amicales laïques (créées dès le début du 20è siècle), la Ligue française de l'enseignement (fondée en 1866 par Jean Macé), les mouvements de jeunes tels que la jeunesse ouvrière chrétienne (JOC fondée en 1925), le mouvement des auberges de jeunesse (crée en 1930 en France) les centres sociaux apparus dans les quartiers des grandes villes, peu nombreux avant 1945, ils connaîtront un véritable essor dans les années 60.

Les comités d’entreprise, issus directement du programme du Conseil National de la Résistance, furent créés en mai 1946 en ayant pour rôle de proposer aux salariés des prestations sociales et de loisirs. Ils ont favorisé le départ en vacances de nombreux salariés en proposant les villages vacances pour les familles, les colonies ou centres aérés pour enfants, les locations ou autres (gîtes ruraux).

Le besoin de « partir en vacances » s’affirme, bien qu’il n’ait pas le même sens pour toutes les catégories de la population. A cette époque, il y avait ceux issus de l’exode rural qui retournaient annuellement dans leur région d’origine, et les salariés urbanisés depuis plusieurs générations, sans plus de racines rurales qui cherchaient des lieux de vacances et d'hébergement.

A partir du milieu des années 60, avec les grands travaux de réseau de transport routiers, c'est l'âge d'or du tourisme social où les C.E. ont joué un rôle déterminant. En 2009, 16,5% des ménages partants ont bénéficié d'une aide d'un C.E. ou assimilé. Parallèlement le chèque vacances est apparu en 1978. Son volume a doublé depuis 10 ans pour atteindre en 2009, 1263 millions d'euros.

 

5 -Retour au naturel

Dès la fin des années 50, le camping renouvelle un loisir qu’avaient découvert les scouts et éclaireurs après la Grande Guerre. Rapidement, il devient en France un facteur de développement du tourisme populaire. En moins de dix ans, une révolution s’accomplit. Le camping devient un lieu de retour à la nature autant qu'un lieu de retrouvailles entre campeurs. Se cultive un désir de sociabilité entre gens qui partagent ces mêmes plaisirs. Puis viennent les caravanes qui permettent de se déplacer plus librement et d'élargir les distances.

Dans les années 70 apparaissent les campings car ou les "combi" souvent bricolés qui permettent à ceux qui préfèrent le vagabondage de pouvoir aller dans des lieux où ils ne sont tributaires de rien ni de personne.

Aujourd'hui le camping est la première forme d'hébergement touristique en France (elle possède 34 % des campings en Europe, 2ème parc mondial). Elle attire tous les âges et toutes les catégories de population (30 % sont des familles). On compte chaque année 6 millions de campeurs français et 2 millions de campeurs étrangers. Cette activité engendre 2 milliards d'euros de chiffre d'affaires annuel et 36000 emplois.

 

6- Une nouvelle façon de prendre la route

Peu à peu, l'aménagement routier codifie la circulation en distinguant les routes départementales, les nationales et les autoroutes qui accélèrent l'accroissement de la circulation automobile. Lors des départs en vacances, l'autoroute devient un rite de passage entre deux mondes : celui du quotidien et celui des vacances. "A une France urbaine que structuraient des axes routiers de rayonnement, se substitue peu à peu une France des régions qui s’articule sur le squelette autoroutier. Colonne vertébrale qui relie le lieu du travail et celui du loisir, elle connecte deux lieux de vie annuels (celui des occupations habituelles et un autre, où démarrent les loisirs de vacances).

L'autoroute concrétise la tendance nouvelle de vouloir raccourcir la valeur du temps. Pour rejoindre une destination à une autre, on ne parle plus de distance, mais de durée du parcours.

Ainsi l'évaluation du voyage n'est plus le nombre de sites ou de villes à traverser, mais le temps mis à parcourir la distance. On est dans le "temps raccourci" et le voyage n'est plus que durée abstraite" dit André Rauch, professeur historien.

En régulant le temps des déplacements, en aménageant les itinéraires, en partageant les mêmes équipements homologués, les mêmes codes et règlements de conduite, les mêmes rythmes, les mêmes flux circulatoires (vacances- week-ends) une nouvelle unité sociétale d'individus ayant les mêmes références et sentiments d'intérêts partagés s'est mise en place.

 

7- Les débuts du tourisme de masse

Au cours des années 60 et notamment après 1968, le temps social se transforme en donnant la priorité aux plaisirs de l'instant. Il se désengage du modèle précédent qui obéissait aux valeurs de la production industrielle et à ses principes de rentabilité. Il s'oriente vers un temps pour soi, plus spontané et improvisé, moins impulsé par l'idée de futur et de progrès.

Jean Viard écrit : "Ah ! le mot magique : partir, voyager... l'extraordinaire liberté ! La première valise, le train de 2è ou 3è classe où l'on montait souvent sans réservation, en famille, avec les provisions. La magie du train, de gare en gare... Puis vient l'automobile et les autoroutes toujours plus courtes avec leurs bouchons traditionnels. Découvrir la mer, l'odeur des collines l'été, la neige et la montagne. Il y eut les modes : saint Trop, Avoriaz, Deauville, Avignon, le Bretagne, la Savoie.

Ce fut l'époque des batailles du tourisme populaire et des premières maisons familiales dans d'anciens presbytères. Puis advint le temps de grands investissements publics, le plan neige, la côte languedocienne, la côte landaise.

La machine à produire des vacances s'est mise en route et n'allait plus s'arrêter. L'avion peu à peu rendit le lointain proche. On apprit à nager, à skier. On s'aima bronzé et la télé des années 70 en imposa la couleur. Le franquisme était oublié, peu à peu bousculé par les hordes touristiques, La France était déjà la première destination touristique du monde.

Des millions, des centaines de millions, demain des milliards de voyageurs. C'est sans fin. Nous étions entrés dans le temps d'une planète nomade sans toujours nous en rendre compte.

Ceux qui votèrent le droit aux congés payés en 1936 ne pensaient qu'au bonheur et au droit des travailleurs à se reposer et à sortir de lieux de vie. Ils voulaient des mineurs qui voient du soleil, des enfants qui découvrent la campagne, des salariés qui campent au bord de la mer, des citoyens ouverts à la diversité et à une vie enrichie de voyages.

Qu'auraient pensé Léon Blum ou Léo Lagrange en voyant qu'ils étaient en train de créer un des premiers secteurs économiques du 21è siècle et qu'ils avaient tourné l'une des clés de la société moderne, un peu à leur insu.

Ils avaient donné un droit, ils eurent la fin des sociétés sédentaires, le début d'une immense mise en mobilité, des habitants des pays développés. Les plages se sont alors bordées de maisons, les campagnes se sont repeuplées, les villes se sont diffusées autour des villages, la recherche d'authenticité est devenue l'objectif de millions de gens.

La population a glissé vers le sud, puis vers la Bretagne, l'île de France est devenue une région de départ. Les villes touristiques sont devenues de grandes villes universitaires et scientifiques ( Nice, Montpellier, etc).

Après la crise du pétrole, à la fin des années 70, la croissance des budgets-ménages a marqué une pause et les Français se mettent à gérer les séquences de loisir en consommateurs avisés et pointilleux sur les tarifs. Progressivement, à partir des années 90, le concept de « tourisme social » est devenu plus difficile à identifier. La tendance des salariés est de s’inscrire dans une démarche consumériste qui favorise la concurrence devenue, de ce fait, très présente et "performante".

8-Voyage, voyage...

En un siècle, nos sociétés ont vécu plus qu'une révolution : un changement de monde, nourri de la découverte d'un gisement sans fin de désir de vacances, de voyages et de tourisme. Une quête de lieux et d'émotions qui nourrit nos quêtes de vie. En 1931 Paul Valéry écrivait déjà : "Toute la terre habitable a été reconnue, relevée, partagée, entre les nations. L'ère des terrains vagues, des territoires libres, des lieux qui ne sont à personne est close. Le temps du monde fini commence".

Avec la baisse des tarifs des promoteurs de loisirs dans les années 75, les distances se banalisent. L'apparition des "forfaits", la promotion des charters, permettent aux touristes de pouvoir voyager dans d'autres continents.

Dès lors, les promoteurs s’adaptent et bouleversent les lieux et rythmes du loisir. Ils standardisent les modes jusqu'à mettre sur le marché un tourisme "aventure", produit conçu au plus près des désirs d'un public ciblé.

Les guides de voyage se sont multipliés et personnalisés en se diversifiant autant dans les propositions dites culturelles ( musées, églises, châteaux, etc) que dans les lieux à parcourir. Puis sont apparus les guides "futés" en recherche d'authenticité qui tranche avec le tourisme de masse.

Les nouveaux guides touristiques et leurs clichés insolites sont partis à la conquête de mondes inexplorés à l'autre bout de la planète, espaces inconnus où le touriste aventurier (guide en main) croit sortir du temps social et accéder à un autre temps plus personnel et créatif...

"Il s'agit de concevoir le voyage non comme une simple excursion liée au hasard d'un parcours, mais comme une incursion dans un lieu où toute chose nouvelle perçue va s'inscrire dans un récit personnel auquel on donnera du sens. Le voyage relève de la fusion. Mais l'illusion n'est pas bien loin.

Ne s’agit-il pas avant tout d’un art du présent, de tout ce qui vénère l’instant, d’une tentative de cultiver les passions liées à l’éphémère ?" André Rauch

 

Bref éloge de la marche ...

En temps qu'activité de sport ou simple loisir, la marche à pied offre une toute autre façon de découvrir le monde. Marcher pour se détendre, pour être dans la nature, découvrir de nouveaux espaces, mais aussi pour échapper à la course délirante que nous menons contre la montre. Rien ne vaut de se déplacer lentement ! Le rythme de la marche révèle des choses cachées par la vitesse, on ne découvre pas un paysage en le traversant derrière la vitre d'un train ou d'une auto. La marche nous permet de quitter les chemins battus pour emprunter ceux de traverse. "C'est aussi passer un bon moment avec soi-même à laisser divaguer ses pensées, ses souvenirs tout en s'imprégnant de ce qui nous entoure. En réglant son compte à l'espace, le marcheur freine la course des heures en changeant le sable du sablier du temps en poudre d'escampette". Sylvain Tesson.

La marche, effet de mode ou recherche d'une forme de loisirs anticonsumériste ?

Aujourd'hui la randonnée pédestre a de plus en plus de succès, avec 15 millions de personnes qui la pratiquent régulièrement, c'est la première activité physique des français en vacances. Le contexte économique et social actuel est favorable aux pratiques de la randonnée car c'est un loisir facilement accessible et praticable partout. Elle est en phase avec les tendances liées au bien-être, aux aspirations nouvelles de retour à la nature, à la simplicité et aux échanges. La marche peut se faire en solitaire, en groupe ou en famille, le temps d'une simple promenade, d'une journée, d'une grande randonnée ou un trekking (rando dans une région montagneuse).

Des milliers de kilomètres de sentiers ont été aménagés en France pour la randonnée, ce sont les GR , sentiers de grande randonnée qui sont balisés le long de leur itinéraire. Notre pays es, pour ses nombreux GR, un modèle de référence par rapport aux pays européens. Les offices de tourisme en proposent les guides, les cartes et itinéraires et les collectivités locales se les approprient en tant qu'instruments de promotion touristique.

Les clubs et les salons de la randonnée (simples ou thématiques) se multiplient dans l'Hexagone et les magasins de sport agrandissent leur rayon "marche". Le trail (course à pied) se développe en parallèle ainsi que la marche nordique.

Le pèlerinage, la nouvelle aventure du loisir ?

Aujourd'hui marcher dans les pas des pèlerins d’antan en empruntant les itinéraires multiséculaires est une étonnante aventure des temps modernes. Le pèlerinage, cette autre manière de prendre la route en marchant, peut répondre à diverses aspirations : être un parcours initiatique personnel, une quête religieuse, spirituelle ou un simple désir de découverte et de rencontres.

Le pèlerinage de Compostelle est depuis 1987 le chemin classé "Premier itinéraire culturel" par le Conseil de l’Europe. Les pèlerins y reviennent de plus en plus nombreux de tous les pays chaque année. Les chemins français balisés les plus connus partent de Paris, de Vézelay, du Puy-en-Velay ou d’Arles.

Le pèlerinage est né le 25 juillet 813, le jour où un ermite découvre en Espagne, la tombe de Saint-Jacques, un des apôtres. Les catholiques, friands de reliques, viennent le célébrer, d’Espagne puis de France. Il sera très fréquenté jusqu'au 16è siècle puis il périclite. Il va renaître à partir de 1950 en France, grâce à la Société des Amis de Saint-Jacques.

Est-il un effet de mode ? En cette période de crises systémiques le pèlerinage peut correspondre à des voies de ressourcement intérieur et de paix. Il constitue un apport non négligeable de revenus pour l'industrie du tourisme et de développement pour une région (exemple : la présence de Lourdes a fait de Pau un aéroport international).

9- Impact du tourisme en France

Secteur majeur de l'économie française, le tourisme rapporte plus de 54 milliards de recettes dans l'hôtellerie, la restauration, les commerces, les loisirs. Il contribue au dynamisme de l'économie nationale et génère près d'un million d'emplois (nombreux pour les jeunes).

La France, première destination touristique au monde depuis 1990, est sans doute le pays qui possède la plus grande densité de monuments, de musées, de festivals mais aussi de lieux pittoresques ou remarquables.

Le tourisme a généré de nombreuses infrastructures et suscité de grands programmes d'aménagement, tant sur le littoral qu'à la montagne, au cours des décennies 1960 à 1980. Nombre de régions touristiques sont desservies par des voies de communication à haut débit (autoroutes, lignes de trains à grand vitesse, aéroports...) qui sont souvent saturées en périodes estivales.

Les départements d' Outre-Mer disposent d'énormes atouts : lagons les plus beaux et les plus sauvages du monde, plages, montagnes et saveurs locales uniques.

Les journées portes ouvertes des musées, journées du patrimoine par leur accès gratuit, permettent au public la découverte de nombreux édifices et autres lieux historiques. De nombreuses foires et fêtes de villages dont la tradition s'était perdue se remettent au goût du jour en favorisant un tourisme local ou régional. Autant de manifestations mises en place depuis l'avènement des loisirs, qui permettent un brassage de populations dans la diversité.

 

10- Travailler, dormir et... la télé ?

La télévision est devenue dans la société occidentale, le média dominant de masse et d'information. Après l’exercice d’une activité professionnelle et le sommeil, regarder la télévision constitue la troisième occupation des occidentaux. On y passe en moyenne plus de deux heures trente par jour en France, alors que la moyenne du temps libre par jour des Français est de 4 heures trente. Le temps passé à des activités de sociabilité (amis, famille, etc) arrive loin derrière avec 30 minutes par jour, les activités les plus répandues comme la lecture ou la promenade représentant un temps encore plus faible..

Derrière la progression de la place de la télévision, la répartition des activités de loisir se transforment aussi : la lecture, par exemple, régresse chez les ouvriers et les employés beaucoup plus que chez les cadres, de même que les activités de semi-loisirs comme le bricolage, le jardinage, les hobbies, etc.

Plus on s’élève sur l’échelle sociale plus l’occupation du temps libre laisse une place réduite au loisir dit « passif », qu’il s’agisse du repos simple ou de l’écoute de la radio ou de la télé (et inversement).

Une enquête en Ile de France montre qu’en dépit du coût d’accès, il existe autant de consommateurs de Canal+ parmi les ouvriers que parmi les cadres !

L’un des aspects majeurs qui ressort des études sur l’usage du temps libéré par les 35 heures est que les ouvriers sont ceux qui ont été les moins satisfaits de la RTT en déclarant préférer plus de revenu à plus de temps libre, essentiellement parce que dans leur mode de vie, le temps libre est pour beaucoup un temps "vacant", qui débouche sur une oisiveté sans but.

Aux yeux de beaucoup d’analystes, la télévision entretient un faible niveau de sociabilité et de structuration des activités personnelles et conduit à une sorte de passivité paralysante. Les chômeurs qui sont mis hors du circuit social, sont nombreux à regarder la télévision (30 h/semaine) et cette surconsommation montre un signe de repli sur soi.

On cite couramment les effets que la télé produit sur le sommeil, la concentration, le développement de l'enfant, l'agressivité et la violence, le comportement social, la santé, l'addiction.

En quelques décennies elle a imposé sa vision de l'information -voir du monde- et relégué les autres médias à des fonctions subalternes. Ils ont dû intégrer parfois (afin de survivre), les valeurs et les normes du petit écran : fascination pour l'image, pour le spectacle, l'urgence, la recherche des scoops, la brièveté, la superficialité, le conformisme, les idées reçues, le jeu avec les émotions, etc.

Le sociologue Pierre Bourdieu, décrit ces mécanismes :“Par sa puissance de diffusion, la télévision pose à l’univers du journalisme écrit et à l’univers culturel un problème terrible : la grande presse a abandonné son rôle intellectuel pour se positionner sur le terrain de la télévision en privilégiant le spectaculaire, l’émotion, les faits divers et les questions relatives aux problèmes quotidiens".

La classe politique a rapidement compris l’intérêt qu’elle pourrait retirer de la télévision. Devenue l’élément central de la vie politique, elle lui dicte ses règles. Le débat politique est désormais proche de zéro, fait de petites phrases, de déclarations tonitruantes, de mises en scène pour séduire. Il faut persuader devant la caméra, avoir des idées simples, faciles à expliquer. Les stratégies politiciennes s’élaborent avant tout en fonction des impératifs télévisuels. La télé occupe tous les débats, voudrait investir tous les domaines de la société".

Les chaînes de télévision sont accusées de céder à la facilité dans la diffusion des programmes au détriment de la qualité et de céder au voyeurisme dans les émissions de télé réalité.

Des associations l'accusent d'être une "machine" à diffuser de la publicité au service des grandes entreprises. "Ce que nous vendons aux publicitaires, c'est du temps de cerveau humain disponible au message publicitaire" avait déclaré en 2004 un ancien président de TF1 !

Depuis les dernières années, la réduction de la durée de chaque plan qui excède rarement les dix secondes contribue à placer l'esprit du téléspectateur sous tutelle et dans un état de fascination télévisuelle, ce qui induit chez lui une pensée sans continuité.

La violence, omniprésente dans un grand nombre d' images diffusées, est à l'origine d'un débat de société qui n'a toujours pas trouvé de réponses définitives. Toutefois des études montrent qu'elle n'a pas seulement augmenté, mais qu'elle est devenue plus spectaculaire et sadique que jamais et très souvent liée à la sexualité.

Dans les années 50, la télé était la réalisation de pionniers créatifs ayant une vision de leur métier et une ambition pour elle. Leurs témoignages (comme celui de Marcel Bluwal) révèlent une forte conscience de corps. Cette période était celle de l’âge d’or des émissions dramatiques et du feuilleton historique, souvenez-vous des "cinq colonnes à la une" "La caméra explore le temps" "bonne nuit les petits"... Il fut une époque où la télévision était vue comme un outil de libération de l’homme, un outil de savoir qu’on s’imaginait présent à longueur de journée de ce petit écran. Vieux fantasme positiviste, les masses devaient enfin avoir accès à la culture !

Souhaiter plus de programmes culturels aux heures de grande écoute est devenu un "vœu pieux" dit-on. L'ère du diktat de l'audimat et de ses profits, a remplacé l'éveil de l'intelligence...

Aujourd’hui les volontés culturelles se limitent à quelques individus présents ponctuellement dans l’organigramme d’une chaîne, il n'y a pas d'esprit de corps.

Pour conclure, du fait de la place considérable qu'elle occupe dans notre société, la télévision est devenue une source d’information prépondérante quant à l’actualité de tout type (mondial autant que régional). Mon propos n'est pas de rester sur des constats négatifs, la télé a permis au grand public une large diffusion cinématographique et sait offrir des émissions de grande qualité (diffusées pour beaucoup, hélas, à des heures tardives).

Il n'y a pas de fatalité à la consommation télévisuelle , c'est à chacun de nous de garder le recul nécessaire dans le rapport que nous entretenons avec elle.

Son impact sur la société, s’avère encore difficile à calculer par manque de recul et surtout de volonté. Quel partenariat réel exercent les millions de téléspectateurs face aux magnats des médias et à leurs lobbies mercantiles ? Un contre-pouvoir à prendre...

11 Le cinéma

Créé en 1892 et inspiré des recherches des Frères Lumière, le cinéma est devenu un art du spectacle populaire, un divertissement mais aussi une industrie. A l’heure où nombreux sont ceux qui cherchent de nouveaux moyens pour partager le temps libre et mieux vivre ensemble, le 7ème art peut contribuer à être un ciment social car il permet de s’ouvrir vers l’extérieur, de développer sa curiosité, de découvrir d’autres cultures, d’aider à se construire, acquérir des valeurs humaines et sociales et à renouer le dialogue entre les générations et entre les communautés.

Au début du 20è siècle, l'industrie cinématographique a débuté la construction de grandes salles de projection (en 1920, il y a 11 salles de 2000 places à Paris), elle s'impose comme un lieu de consommation culturelle de masse. Contrairement au théâtre, ou à l'opéra, elle ouvre un espace commun, sans distinction sociale. Moins coûteuse, sa fréquentation concerne un public plus large. Dans les années 1930, l'arrivée du parlant lui donne un regain.

Dès1945, la fréquentation augmente à nouveau et les spectateurs préfèrent en ces temps-là, les films français et ses stars (Jean Gabin, Michèle Morgan, Gérard Philipe, etc). Dans les années 70, la hausse du prix des billets, le développement de la télévision et notamment des chaînes privées (qui diffusent des films en "produits d'appel") accentuent l'abandon des salles de ciné par les classes populaires.

Dans les années 90, l'arrivée des multiplex permet un nouveau mode de consommation du cinéma dit de "grand public" et la fréquentation repart à nouveau à la hausse en accueillant désormais près de 60% des spectateurs.

En parallèle, les salles de cinéma d'art et d'essai, réseau indépendant, se créent en 1959 pour favoriser la production et la circulation d'un cinéma sans frontières. Son fil conducteur est la pluralité de la création, la défense du cinéma en tant qu'expression artistique singulière, dans un esprit d'indépendance par rapport aux lois du marché. S'adressant à un public cinéphile, il représente environ 10 à 25 % de la fréquentation des cinémas.

Malgré leur label, les salles de ciné d'art et d'essai voient leurs existences de plus en plus compromises dans le monde rural autant que dans les moyennes et grandes villes. Les multiplex en revanche poussent comme des champignons en faisant partie du paysage urbain comme toutes les autres grandes surfaces. "Une salle de cinéma qui disparaît, c'est des voix qu'on étouffe, des yeux qu'on ferme".

Les années 2000 voient une fréquentation record des salles de ciné, avec certains films populaires (comme "Les intouchables", "Bienvenue chez les chtis"...). ainsi que l'apparition des films en 3D . Sur les 12 derniers mois écoulés, les entrées dans les salles sont estimées à 210,83 millions soit + 8,7 % par rapport à 2013.

La part de marché des films français est estimée à 44 %, celle des films américains à 46,5 % et celle des autres films à 9,4 %.

Face à l'Europe, la France se distingue par le nombre élevé de ses productions, de ses écrans, et de sa fréquentation. Elle est aussi un des seuls pays où les films d’autres pays européens sont accessibles, et nombreux sont les auteurs qui viennent y produire ou coproduire leurs films.

Le Festival de Cannes fondé en 1946 (par le ministre Jean Zay) est le plus médiatisé et le premier marché du film au monde. Derrière lui, d'autres festivals spécialisés se montent un peu partout dans l'Hexagone.

En 1976 se crée la cérémonie des Césars (calquée sur le modèle des Oscars américains). Ce rendez-vous annuel de la profession ne permet pas cependant de réconcilier les différentes chapelles du cinéma français que sont le ciné d'auteur et le ciné commercial, le ciné sérieux et la comédie... les transferts sont encore rares.

La télévision est devenue la première cliente du cinéma. En devenant coproductrices les chaînes télé aident au financement des films par l’acquisition des droits de diffusion des films.

Le statut de loisir collectif du cinéma reste un rempart solide contre les autres formes de diffusion médiatiques.

12 Les médias : internet, jeux vidéo et les nouveaux loisirs

La diffusion extrêmement rapide de l’ordinateur et de l’internet dans les foyers, phénomène le plus marquant de la dernière décennie, s'inscrit dans le mouvement général d'enrichissement du parc audiovisuel domestique qui a débuté dans les années soixante. Est-il facteur d'isolement ou de convivialité ? 60 % de la population française sont équipés d'un ordinateur, 12 % en possèdent plusieurs, 43 % possèdent une connexion internet.

Les lecteurs et graveurs de DVD ont remplacé les magnétoscopes, les consoles de jeux ont conquis de nouveaux foyers, et les lecteurs MP3 ont démultiplié les facilités d’écoute de la musique.

Si on ajoute le succès des téléphones portables multifonctions, on prend la totale mesure du nombre considérable des possibilités de consommation, de stockage et d’échange de musiques, d'images et de textes, auquel on a assisté depuis la fin des années 1990, et ce aussi bien dans l’espace privé du domicile qu’ailleurs. Les conditions d’accès à l’art et à la culture ont profondément évolué en moins de dix ans, les appareils fixes ont été supplantés ou complétés par ces appareils, le plus souvent dits "nomades", offrant une large palette de fonctionnalités.

13- Les effets de la montée des nouveaux médias

- montée en puissance des écrans

Les écrans sont devenus le support privilégié de nos rapports à la culture, tout en accentuant la perméabilité entre culture, distraction et communication. Avec le visionnage d’images et d'écoute de musique, mais aussi de lecture de documents et aussi de livres entiers, sans parler de la présence désormais banale des écrans dans les bibliothèques, les lieux d’exposition et même parfois dans certains lieux de spectacle vivant… tout est désormais potentiellement visualisable sur un écran et accessible via l’internet.

Les jeunes des milieux favorisés ont été les premiers bénéficiaires des diverses opportunités offertes. Ils sont aujourd’hui les principaux utilisateurs de l’internet et des nouveaux écrans, alors que la télévision recrutait (et continue à recruter) l’essentiel de ses gros consommateurs parmi les personnes âgées et peu diplômées. L’internet quant à lui, concerne davantage les catégories de population les plus investies dans le domaine culturel (informations, écrits, documentation, lecture numérique, sites ou blogs, etc).

Que penser de cette profusion d'images sur les écrans omniprésents qui envahissent notre vie ? Et comment décrypter et échapper aux messages subliminaux qui se diffusent à travers elle ?

- Le recul de la télévision et de la radio

Les Français sont dans l’ensemble plus nombreux qu’en 1997 à regarder la télévision tous les jours mais, pour la première fois depuis son arrivée dans les foyers, le temps passé devant le petit écran a cessé d’augmenter et a diminué chez les jeunes. La baisse est encore plus marquée pour la radio, qui a subi la concurrence de nouvelles manières d’écouter de la musique ou de s’informer en ligne (sites d’écoute en streaming, blogs,etc).

- Recul de la lecture

Le recul de la presse quotidienne est essentiellement dû, aujourd’hui comme hier, à la diminution du nombre de lecteurs quotidiens : de moins en moins de Français lisent chaque jour un journal. Ce recul est antérieur à l’arrivée de l’internet et touche la presse nationale et régionale.

Cette érosion concerne aussi le livre. Il y a aujourd’hui plus de Français à n’avoir lu aucun livre dans le cadre de leur temps libre au cours de l'année précédente qu’il a vingt ans. Chaque nouvelle génération démontre un niveau de temps de lecture inférieur à la précédente, ainsi le phénomène s’accompagne d’un vieillissement du lectorat.

La lecture fait partie des loisirs quotidiens des enfants en primaire car elle est utilisée comme moyen pédagogique et aussi comme un plaisir. Dès le plus jeune âge on met des livres dans les mains de l'enfant. Le nombre croissant de livres pour la jeunesse vendus (21 % des ventes) révèle ce phénomène. Un large éventail de lectures superbement illustrées leur est proposé.

Dans le secondaire avec la segmentation des enseignements, le livre devient un objet de travail, 13 % des ventes concernent les livres scolaires et 7 % les dictionnaires. L'adolescent délaisse la lecture qui est un acte solitaire pour se tourner vers un lien permanent avec les autres. La bande dessinée et les mangas l' attire davantage (10 % des ventes). On constate que les filles lisent davantage que les garçons pour qui la lecture semble éloignée des valeurs qu'ils supposent être celles de la masculinité. Le monde des professionnels de la lecture est féminin à 80 %: bibliothécaires, libraires, instituteurs. Dans les familles ce sont les mères qui sont les premières acheteuses du livre et ce sont souvent elles qui font la lecture.

Les livres consacrés à la littérature représentent 25 % des ventes.

Internet ne semble pas avoir modifié le décrochage chez les jeunes de la lecture. Force est de constater que nous passons plus de temps à lire sur écran qu'à lire des supports sur papier. Et puisque les supports se sont modifiés, la lecture s'est modifiée elle aussi "Avec internet on est dans l'hypertexte, on ne lit plus dans l'ordre, on passe d'une page ou d'un paragraphe à l'autre sans s'attarder comme avant sur des textes narratifs. On n'est plus dans les lectures linéaires et cumulatives mais dans des lectures circulaires et itératives. C'est ce qu'il y a de plus important dans les mutations de la lecture aujourd'hui. " nous dit la sociologue Sylvie Octobre.

La lecture devient-elle une pratique d'élite ? Selon les études il semble que non, les élites comme les autres lisent moins qu'hier (alors qu'on fait davantage lire les enfants).

"On est passé d'un monde où les élites avaient été formées aux humanités, à un autre monde de polytechniciens ou de commerciaux, qui n'ont pas acquis le rapport révérencieux à l'écrit et à la littérature d'autrefois. La culture n'est plus un sujet fondamental" Sylvie Octobre

La lecture reste encore la principale porte d'entrée dans le monde de la connaissance. Il n'en a pas toujours été ainsi, et pas partout. Mais existe t-il une région du monde, un métier, une qualification qui puisse désormais se passer de la lecture ?

Le livre reste malgré tout la première industrie culturelle en France avec 3,9 milliards d’euros en 2013. Globalement le marché ne se porte pas trop mal bien que l'activité continue à s'effriter, 450 millions de livres ont été vendus en 2012.

La fermeture et le recul d’activité de dizaines de points de vente ont affecté les circuits des librairies contrairement aux grandes surfaces du livre ou des centrales d'achat via internet (espaces virtuels et sans interlocuteurs).

L'apparition des tablettes, des liseuses électroniques et des livres numériques continue de croître. Ce marché qui a doublé de taille en un an, va-t-il lui aussi affecter les librairies ? Le métier de libraire est-il en train de devenir peu à peu une espèce en voie de disparition ? Redoutable perspective pour le consommateur du livre papier et des éditeurs indépendants qui trouvent dans les librairies des circuits parallèles. Une menace nouvelle se profile : celle du monopole de la diffusion de la culture orchestrée par les lobbies mercantiles des grandes centrales d'achat.

Le livre a toujours su cohabiter avec d’autres technologies et d’autres loisirs - radio, télévision, musique, jeux vidéo. Comment va-t-il perdurer face aux écrans mobiles connectés ? L'un des enjeux de la filière de l'édition et de la vente de livre est de s'adapter à l'évolution des consommateurs et de leur nouveaux modes de consommation. A voir...

13- Arrivée de l'internet

Né en 1969, le réseau, qui s'appelait ARPANET, devait assurer les échanges d'informations électroniques du département de la défense aux USA.

Aujourd'hui, plus d'un Français sur deux a déjà utilisé internet au moins une fois dans sa vie.

Les avantages

Il est un outil pour la recherche de l'information et du savoir. Un moyen de communication avec nos contacts du monde entier : on a vu le rôle important qu'il a joué par dans les révolutions arabes. Il ouvre l'accès à des services, à des formations, des consultations médicales à distance.

Les dangers

L'internet peut devenir une addiction. Il favorise le copier/coller et empêche l'effort personnel du travail de recherche. Il peut être utilisé à des fins frauduleuses. La quantité de données qui circulent ne sont pas toutes éthiques ou favorables. Il manque de confidentialité sur des informations personnelles et peut favoriser une mauvaise hygiène de vie devant l'écran.

La proportion de texte lu à l’écran via Internet : représente 57 % alors que la lecture sur support papier ne représente plus que 30 % et cette proportion va continuer à décliner à mesure que les journaux et revues passeront sur support tablette électronique.

Que font les jeunes sur internet ?

Quand ils utilisent les multimédias, les jeunes déclarent vouloir : communiquer, s'informer et se distraire. Faut-il s'inquiéter de la place que prennent les multimédias dans leurs loisirs ?

L'usage est positif jusqu'à une certaine limite d'intensité : la majorité des jeunes ne dépasse jamais ce seuil. Si une minorité le fait, c'est occasionnellement, très peu s' enlisent. Via la fréquentation des multimédias, les jeunes vivent la réussite de projets et développent des compétences personnelles originales. Tout ceci est bénéfique pour la confiance en soi et la construction de l'identité. Ils y trouvent aussi le moyen de satisfaire leur curiosité, de faire des apprentissages.

Les jeux vidéos, moments ludiques de détente et de partage en ligne, peuvent en revanche entraîner des dérives. Selon les experts le jeune qui s'investit comme acteur d'un jeu vidéo peut exprimer une certaine forme d'agressivité ou avoir une vision de la violence comme de quelque chose de normal dans la vie réelle. D'autre part, le sentiment de réussite et de maîtrise de soi que le jeune ressent dans le jeu peut l'entraîner à se couper du monde réel, dans lequel il se sent peu valorisé, pour s'évader dans un monde virtuel où il trouve des satisfactions personnelles. Les risques de dépendance ne touchent qu'une petite partie des mineurs : 2 à 4 % des jeunes. Les parents évaluent mal parfois la consommation de leurs enfants, d'où l'importance du dialogue entre parents et adolescents.

14- La place du sport

Dans nos sociétés des loisirs, le sport connaît un essor considérable.

Dès l'Antiquité, on a pris conscience du rôle bénéfique d'une activité physique régulière. Mais ce n'est que récemment que l'on a pu mesurer les liens étroits qui unissent sport et santé.

Dès lors s'est opérée une prise de conscience de la responsabilité individuelle dans la préservation de la santé, la maladie étant de plus en plus perçue comme liée à un mode de vie nocif. Cette prise de conscience a coïncidé avec d'autres évolutions sociales notables : l'augmentation du temps libre, l'apparition des loisirs, le nouveau culte du corps et le souci de la minceur (tant chez les hommes que chez les femmes). Tous ces phénomènes allaient se conjuguer pour renforcer les rapports entre sport, corps et santé. Pour « se sentir bien dans sa peau », il faut donc prendre soin de son corps, mener une vie saine à travers l'expérience d'un sport. De fait, la pratique sportive, qu'elle soit stimulée par des motivations esthétiques (sculpter son corps), ludiques (rechercher du plaisir) ou médicales (rester en bonne santé) s'est considérablement développée.

Le sport de loisir a connu un essor considérable : jogging, gymnastique, piscine, vélo d'appartement, ski, musculation, randonnée, sans motivation de compétition mais uniquement de loisir et d'hygiène corporelle.

Le sport de masse, plus intensif, regroupe tous les pratiquants ayant une licence dans une fédération (football, rugby, cyclisme, tennis) Le sport de haut niveau représente l'excellence sportive. Au total la pratique sportive se traduit nettement dans les chiffres : en France en 2003, 34 millions de personnes ont pratiqué au moins une activité sportive de façon régulière ou occasionnelle, et 15 millions de licences ont été délivrées par 114 fédérations agréées. On notera le poids des fédérations multisports, en particulier celles du sport scolaire.

Fonctions du sport

. La détente : l'activité physique est un exutoire des agressions que le citadin reçoit quotidiennement, et la pratique physique joue en ce sens un rôle de catharsis en libérant l'agressivité contenue et en défoulant un trop plein d'énergie

. le divertissement : le concept du jeu occupe une place importante dans la pensée humaine en permettant d'échapper momentanément aux réalités quotidiennes

. le développement personnel, le dépassement de soi pour progresser qui se situe à la frontière du plaisir, de la compétition et d'une fonction psychosociologique tendue vers l'affirmation personnelle.

. la socialisation : la pratique sportive touche tous les métiers et tous les niveaux sociaux, la pratique féminine du sport a augmenté de 47 %

. l'équilibre psychologique : le sport peut être un moyen de lutte contre les tendances dépressives. En revanche, l'équilibre psychologique est parfois menacé par le sport. Le surentraînement de nombreux sportifs de haut niveau conduit parfois à des états proches de la dépression professionnelle (le burn-out) par une stimulation permanente des hormones du stress.

De plus en plus le sport de loisir subit la logique de la performance. Elle est encouragée et stimulée dans notre société qui prône la réussite comme une qualité morale.

. la fonction économique du sport : les industries de l'habillement, de l' alimentation, du matériel sportif ont vite réagi avec des innovations textiles et matérielles. Dans les familles 10 % du budget sont réservés au sport.

Le sport a favorisé la création des parcs nationaux et régionaux, de bases de plein air périurbaines et rurales.

 

Le sport de haut niveau

Le sport de haut niveau commence de plus en plus tôt, impliquant un nombre croissant d'adolescents et même d'enfants. Le système de détection des futurs champions s'étend désormais dans la population enfantine. Un jeune garçon doué pour le football intégrera dès l'âge de 13 ans un centre de formation : soit un centre de préformation fédéral (il en existe six en France), soit une section sport-études en collège, souvent dirigée par un club sportif sous contrôle de la fédération nationale. A cet âge, il est déjà astreint à plus d'une heure et demie d'entraînement quotidien et à une compétition hebdomadaire, et à partir de 15 ans son volume d'entraînement va doubler.

Au final, le paradoxe du sport contemporain dans son rapport avec la santé est loin de se résumer au sympathique adage : « Le sport, c'est bon pour la santé. » La formule d'Hippocrate serait sans doute plus ajustée : « Tout est poison, rien n'est poison, tout est question de mesure"

 

La place du football

Le foot est le sport le plus populaire en France. Il réunit 2,2 millions de licenciés dont 2/3 ont moins de 18 ans. Phénomène culturel, il occupe une place de choix dans la construction de l’espace social au vu du nombre important des clubs de foot, des clubs de supporters et de la fréquentation régulière du public lors des matchs et des tournois. Le football est devenu de nos jours un élément fort de construction identitaire : les enjeux idéologiques et politiques qui en résultent en font soit un espace cathartique déclencheur de haines nationales pouvant aboutir à des affrontements guerriers soit un moyen de rapprochement des populations et des peuples.

L'éthique et les valeurs de ce sport sont gangrenés par l'argent et les dérives de responsables de clubs, de fédérations et de membres éminents de la FIFA. Les joueurs se marchandent d'un club à un autre à des tarifs exorbitants. Des fonds financiers investissent les terrains d'entraînement où recruter de jeunes prodiges... Le football moderne n'a plus rien du fair-play.

Parce qu'il est le sport le plus populaire il se doit d'offrir notamment aux jeunes une image exemplaire car le sport doit rester avant tout la fête de l'humain et de la fraternité loin des dérives mercantiles.

La place internationale du sport

En 1894, le baron Pierre de Coubertin fonde le Comité International Olympique (CIO) afin de faire revivre les anciens Jeux olympiques après une absence de plus de 1500 ans, en voulant contribuer à bâtir un monde pacifique au moyen du sport en promouvant le dialogue, le fair-play et l'entente entre les peuples.

"Le sport est l’expression moderne de grandes traditions culturelles du passé. Sans l'esprit sportif, la survie d'une concurrence loyale et pacifique entre les nations n'aurait pu être imaginée. Langage universel il permet de créer des ponts entre les différences sociales, religieuses et de genre. Il peut contribuer à combler les clivages et promouvoir les valeurs fondamentales nécessaires à une paix durable" dit Max Horkheimer, philosophe et sociologue allemand.

La mondialisation de l'économie a englobé les différents marchés de l'économie du sport. N'importe quel événement sportif peut se mondialiser dès lors qu'il est retransmis par la télévision. C'est dans ce contexte que des relations cruciales se sont nouées entre l'économie du sport m&eac

du temps libre pour la lenteur...

"Parce qu’elle implique de la prise de distance et de la minutie, et qu’elle laisse toute sa place aux dynamiques collectives et citoyennes, seule la lenteur peut nous permettre de développer une nouvelle façon de voir, de penser et d’organiser le monde. A l'heure où la performance est requise sur tous les fronts de l'existence (travail, couple, famille, vie sociale et même... loisirs !) il nous faut rééquilibrer rapidité et lenteur dans notre vie...." Carl Honoré "Slow attitud

 

du temps libre pour goûter au silence

Il n'y a plus de silence, on le brade, sans lésiner. Le vrai silence est un trésor dilapidé. De ce paradis-là il ne reste des preuves qu'aux confins des déserts, des steppes ou des glaciers. Le silence s'effondre dans le monde entier. Le bruit nous traque, il rôde toujours quelque part, l'époque est au vacarme.

"Le silence, c'est du temps perforé par des bruits. Il est la couleur des événements. Si on l'écoute, il nous parle et nous renseigne sur l'état des lieux et des êtres, sur la texture et la qualité des situations rencontrées. Lieu de la conscience profonde, il fonde notre regard et notre écoute.
Comment, dans le tumulte des pensées, fantasmes, images qui nous habitent, peut-on arriver à retrouver le silence en soi ? Dans un monde de plus en plus bruyant, la valeur du silence est à redécouvrir. Nous l'avons peut-être oublié, nous sommes des êtres porteurs de toute la sagesse immémoriale du silence. Marc de Smedt, écrivain journaliste.

 

du temps libre pour la paresse

Nous détestons souvent ce mot paresse qui a une connotation négative de répugnance à l'effort et au travail. Notre culture stigmatise le fait de ne rien faire et nous en fait sentir coupables.

Ne rien faire nous paraît habituellement impossible. Le fait d'être toujours concentrés sur des choses à faire, à planifier et à organiser, fait réagir notre cerveau en dégageant des hormones de stress et en se mettant dans un état d'hyper vigilance qui fait souffrir notre capacité à penser clairement. Le cerveau devient très actif quand on ne fait rien et que l'on prend son temps. Il se met à travailler sur ce qui se passe intérieurement dans notre conscience et nous permet ainsi de mieux comprendre nos émotions. D'où l'importance de ces temps de vacance, de relâche, dans notre existence. Notre monde contemporain nous invite à toujours vouloir "faire plus", ne s'agirait-il pas d'en faire "un peu moins" dans tout et par là même d'être un peu moins "productifs" ? (moins acheter, moins gérer, moins planifier, moins préjuger, moins prévoir et s'inquiéter, moins se plaindre, etc).

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CONCLUSION

Contredisant l’utopie futuriste qui a fleuri dans les années soixante, selon laquelle une société du temps libre allait progressivement se substituer à une société laborieuse, l’évolution en cours des modes d’organisation du travail s’accompagne d’un renforcement de la pression de la productivité pour les actifs ayant un emploi et de la marginalisation d’un grand nombre d’actifs sans emploi.

Dans cette perspective, la demande de temps libre se trouve exacerbée par l’intensification du stress professionnel, en particulier dans la population des cadres devenue l’une des catégories les plus exposées. Mais au-delà de l’activité professionnelle elle-même, le besoin de temps libre doit être mis en rapport avec l’ensemble des contraintes qui s’imposent aux familles : l’allongement de la scolarité des enfants, l’égal investissement professionnel des deux conjoints, les transports entre les lieux de résidence et les lieux de travail. A eux seuls, ces facteurs permettent de comprendre pourquoi les Français qui ont bénéficié de la RTT ont d’abord investi ce temps libéré dans les activités du foyer.

Le travail, de nos jours a perdu son sens de finalité pour devenir une nécessité et le loisir semble s'inscrire dans cette boucle rétroactive : on en vient à considérer le loisir comme un temps occupé et le temps libre se doit d'être investi dans des activités organisées, qu'elles soient ludiques ou non, par crainte de tomber dans l'oisiveté. Étrange paradoxe, cet activisme fait perdre au loisir son sens de temps libéré qui devient alors un temps meublé, quantifié, planifié. La course à rattraper le temps, qu'elle soit dans le travail ou dans les loisirs, n'a pas fini de nous entraîner dans une spirale où tout s'accélère et où la moindre parcelle de temps perdu devient insupportable !

La réalité nous montre que depuis la fin des années 1990, les écarts se creusent selon les niveaux de vie et qu'ils déterminent en grande partie le fait de partir en vacances ou non : 70 % des cadres supérieurs partent en congés chaque année, contre 40 % des ouvriers. Le taux de départ en vacances a légèrement augmenté du début des années 1980 jusqu’au milieu des années 1990. Depuis, il s’est sensiblement réduit de presque dix points. Le temps libre qui ouvre un potentiel de consommation tout en haussant le coût d'entrée des pratiques de loisir, creuse les inégalités entre les groupes sociaux au lieu de leur permettre de développer des potentialités neuves d'épanouissement.

Le loisir est autant la promesse d'une re-création pour l'individu et pour la société que la possibilité d'éclosion de nouvelles formes artistiques, culturelles, sportives et de projets désintéressés éloignés du monde marchand et consumériste. L'avènement de la société des loisirs nous mènerait-il au retour à "l'âge d'or "? Qui sait, peut-être ? Le propre de l'utopie est de mettre du temps pour subvertir le réel, qui aurait pensé il y a seulement un siècle que l'avènement du temps libre et des loisirs bouleverserait de fond en comble une société millénaire basée sur le travail ?

Aurore ORENSANZ BESSY

 

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Bibliographie : 

Jean Viard, sociologue "Eloge de la mobilité"

Joffre Dumazedier sociologue '"Vers une civilisation des loisirs"

André Rauch professeur historien universitaire "Les usages du temps libre"

Hanna Arendt, philosophe "La crise de la culture"

Pierre Bourdieu, sociologue "Sur la télévision"

Marc de Smedt, journaliste écrivain "Donner du sens à sa vie"

Carl Honoré, journaliste canadien "Éloge de la lenteur"

Sylvie Octobre, sociologue

Laurent Schmitt, psychiatre "Temps intime"

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