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Il était un pays...

 

En ce temps le patois taillait au coeur des chênes

Ses lettres de noblesse arrosées de vin gris

La pipe des conteurs fumait sans perdre haleine

Des mots ronds et trapus qui chantaient le pays.

 

On rimait à l'envi les êtres et les choses

On allait en sabots courir le guilledou

Les filles avaient le goût de naître dans les roses

Les garçons préférant la bonne odeur des choux.

 

Chacun se régalait des parfums de la terre

Pour un civet de lièvre ou des cailles grillées

Braconniers et gendarmes se faisaient noble guerre

Avant d'être complices aux fêtes du curé.

 

En ce temps les lieux-dits affichaient leur naissance

Arbres ruisseaux rochers servaient de prête-noms

Vendanges et moissons décoraient les faïences

Les femmes sous la bure portaient de blancs jupons

 

Les hommes ne parlaient jamais pour ne rien dire

Ils se nourrissaient d'eau de feu de terre de vent

Leurs mains d'écorce brune ne savaient que construire

Nul ne blessait le chêne en récoltant le gland

 

Aujourd'hui la bruyère ne nourrit plus la laine

Le ventre des labours enfante des chardons

Les cheminées en pierre jouent les demi-mondaines

Des fleurs artificielles dorment dans les chaudrons

 

Et l'horloge ancestrale dressée comme un clocher

Qui égrenait son temps sans se soucier de l'heure

Sonne à présent le glas dans la nuit du berger

Le dernier paysan du val fleuri se meurt.

 

 Poésie en Stéphanie 2003

 

Tag(s) : #Poésies
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