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C'est l'heure des plateaux, l'heure approximative du roulement de soupe et de machins qu’on n’a pas besoin de mâcher. Ca sent bon...enfin...meilleur que des relents de pharmacie et d'urinoirs !

L'infirmière aussi sent bon, dans la presque transparente fraîcheur de sa blouse blanche. Les écuelles sont en place, entre plastique et fer-blanc, avec presque des marques anciennes de dents.

                                                                                                 

Dehors, les fêtes se préparent. Les futurs vieillards s'accrochent à leur cinquantaine, entre faïence, cristal d'Arques, arcopal et porcelaine. Les futurs adultes s'en fichent pas mal, les pieds sur leur piédestal, la vie grande ouverte devant leur acné et leurs jambes aux énergies renouvelables !

Ici, ça sent la soupe. Mange de la soupe, tu deviendras grand comme maman !

Maman, c'est toi, là, avec le bavoir Niagara, dans la chemise blanche écrue de la mortification hospice de la civilisation?

 

Les bouches tordues mastiquent le bouillon, mastiquent la purée, le yaourt aux couillons, et les derniers grincements de dents de leurs illusions.

Vas-y voir, crois-moi, c'est ça, l'heure approximative du repas, des chutes du Niagara, des cuillères que l'on enfourne parfois, des remplissages d'estomacs ! Vas-y voir ! Ta mère n'est pas là ? Ca viendra.

 

Dehors, les cloches sonnent, les marronniers marronnent, le Sauveur de service est descendu - je CROIX - de sa branche cruciforme, pour apporter la bonne parole chloroforme. Les oies, les canards, les chevreuils, les sangliers, les dindes, les homards pendent aux abattoirs. Les christs sont en sautoir. Le poète vomit ce soir...

 

On fait manger le dernier. Dépêche-toi tu nous retardes !

Le conducteur ramène sa guimbarde jusqu'aux jets de purification. Il reste un peu de soupe pour le chien, pour le chien du gardien, celui qui taille les marronniers, les marronniers de la liberté !

 

Maman, tu veux plus ton yaourt ? Tu chanteras plus tard, c'est pas l'heure !

C'est l'heure du coin-culotte, du dentifrice cancoillotte, de la Mont Saint-Michel en ribote. La nuit sur son chêne hulotte. Bon Dieu la terre tourne et l'odeur de vieux cocotte !

 

Fais-moi pas ça...plutôt le mur et sa liberté de forçat ! Eteins, va ! T'as la sonnette et ça ne va pas...et les yeux fermés si on ne vient pas !

Dehors la nuit déconne à pleins tubes. C'est l'heure à ne pas regarder l'heure. De toute façon elle viendra, n'aie pas peur !

 

Ici la vieillesse veille, étoile de l'hébergé, juste au-dessus du Fils qui garde un œil sur ses parents et leur ouvre grand les bras, éternellement là-haut, sans manger, peut-être parce qu'il n'aime pas leur soupe ou la purée trop hachée...

C'est l'heure approximative de plus rien, de ronflements...et qui sait de prière dans un coin. La peur pousse la nuit un peu plus loin, vers demain..

 

Maman, donne-moi la main !

Décembre 2008 

 

 


Tag(s) : #Poésies
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